14H00, entre Cies et Baiona. 48M de fond. Down under… le bronze ne flotte pas bien. Et on n’est même pas vendredi 13.

Jeudi 12, 10h30 ore locale. Météo (origine zyGrib) : vent entre 5 et 6 kts du NW, faiblissant à la sortie de la Ria, forcissant vers 10 Kts en fin d’après midi Visi >10 Nm. Baro 1020 stationnaire. Route probable – 180° depuis l’embouchure de la Ria de Baiona, jusqu’à l’entrée du Rio Lima

Le vent commence à forcir un peu, le large pointe le bout de son nez derrière les Islas Cies. A gauche – des ilots rocheux couverts par le secteur d’un phare et une bouée cardinale… attends un peu, ça doit être une ouest. On s’est un peu trainés à 3 nœuds au près, pour arriver ici. D’un seul coup le vent commence a rentrer, a tourner un peu plus nord et a remplir les voiles. Le bateau avance, accélère, 4kts, 4,5kts, 5kts. Même 5,2… on commence a entendre l’arbre du moteur tourner (je ne sais pas encore si il faut embrayer ou laisser tourner, pour l’instant je le laisse. Et en tout cas, ce n’est pas urgent).

D’un seul coup, en tournant, il commence a faire un drôle de bruit. D’un gentil frottement tout doux ça devient un genre de crissement sourd, puis des vibrations bruyantes et inquiétantes commencent a se produire. Premier réflexe – justement – j’embraye. Deuxième réflexe – je cours sur la plage arrière. Le troisième réflexe – c’est Aglaé qui m’a demandé si je ne l’ai pas eu… « ben alors… t’as même pas plongé ? » La blague, histoire de pas se tailler les veines tout de suite… Plonger… Ben non, je n’ai pas eu le temps. J’ai juste eu le temps de la voir couler. L’hélice. MERDE !

Il est environ 14h00, j’annonce à Aglaé la nouvelle. « On vient de perdre l’hélice. ». helice-bateaux-3-pales-21508-233491Le reste, c’est de la cuisine. Je décide tout de suite qu’il vaut mieux rentrer à Cangas plutôt que de descendre dans le Rio Lima, à Viana de Castelo, ou on ne connait pas le port et l’entrée peut être délicate, courant dans la rivière et pont (fut-il fait par Eiffel) dans lequel je n’ai aucune envie de m’encastrer. On empanne rapidement, on revient sur nos pas, on se retrouve à nouveau dans la Ria et sans vent. On s’écarte de la rive sud, on avait bien vu qu’il n’y avait pas un souffle d’air. En remontant vers le milieu de la Ria on évite un peu un gros bateau de pêche qui fait des ronds dans la baie (Aglaé me demande si il n’y a pas un signal a envoyer dans la mature pour dire « je suis sous voiles et je n’ai pas de moteur »… ben non, t’es sous voiles, il y a un peu de vent, tu te débrouilles). On se débrouille. On commence a réfléchir comment faire pour de faufiler entre les ferries qui font le va-et-viens entre Vigo et Cangas, on appelle Henri.

Henri est le capitaine de Shenandoah, un joli cotre en alu, basé à Caen, qui a fait un bout de chemin avec nous. Un type solide, ancien chef de base aux Glenans, super sympa, ça ne gâche rien. Ça fait un bien fou d’avoir un gars comme ça à ses cotés. Il ne réfléchit pas bien longtemps avant de dire « bon, ne vous inquiétez pas, je vous prends en remorque. » C’est bien, de pouvoir compter sur les amis. « Henri, on sera devant l’entrée de la baie de Cangas – si le vent tient – dans une heure et demie ». « OK, si ça tombe, si vous êtes encalminés ou autre chose, appelez. Je reste en veille sur le 72 ». Au moins, de ce coté-là, on est parés.

On arrive devant, entre temps une petite brise thermique nous pousse jusqu’à la bouée « danger isolé » qui marque l’entrée dans la baie. On fait des tests, grand-voile et génois a moitié roulé par exemple, on roule tout devant, on songe a établir la trinquette. Henri a fait un tour dans le port, il rappelle. « Roz Avel, Roz Avel ». « Il y a deux places, celle que vous aviez ce matin et une autre, un peu avant. Dans le port vous serez pratiquement bout au vent, je viens vous prendre à couple avec mon annexe pour vous servir de propulsion. » 2,3ch, c’est peu, mais assez pour nous pousser un peu jusqu’au port, dans peu de vent et sans clapot. On tire des bords, sous GV seule et Honda 2,3ch, un coup derrière le ferry qui arrive, un autre derrière celui qui sort, un troisième devant les cailloux avec la statue bizarre «tu te rappelles qu’on y a fait un tour l’autre jour » me dit Henri « fais gaffe, derrière il n’y a pas d’eau » et le quatrième bord, plus le petit HB de l’annexe, plus une risée de la mort sortie de nulle part, nous collent pile contre le ponton. Ouf. Merci Roz Avel, merci son équipage, merci Henri, merci Honda. Et merci Eole pour la risée de la mort.

Bière, « sidra » et une grosse respiration au bar du port. Ça, c’est fait. Maintenant, faut trouver des sous, pour payer au moins un mois de port ici et une hélice neuve. Il va falloir en vendre, des aquarelles.

écrit à Cangas, Ria de Vigo, Galicia… J’avais d’autres projets d’écriture pour ce soir. On a décidé pour moi.

vendredi 13 (j’ai bien dit treize…) septembre 2013

À propos de Gu sur Roz Avel

Skipper of Roz Avel, a Kelly Peterson 44 cutter, built in Taiwan for Jack Kelly from San Diego, on a Douglas Peterson design. Sailing around the world without deadline or precise destination. Been in Galicia, Portuguese coast, Algarve, Andalucia. Waiting to put at sea again, she spends a tranquil winter in Saïdia, Oriental Morocco

Publié le 13 septembre 2013, dans bateaux, Espagne, Galice, Roz Avel, voile, voyages. Bookmarquez ce permalien. 7 Commentaires.

  1. Comme s’il n’y avait pas assez de saloperies dans le fond des mers… Pollueurs !
    L’occasion pour vous de vous immerger plus avant dans la culture locale !

    • Ben oui, on assume, on a pollué… maintenant il va falloir manger plein d’empanadas pour compenser ! Pour la culture, oui… je regrettais de ne pas avoir assez exploré Vigo, je pense que je vais avoir le temps. Vivement la nouvelle collection d’aquarelles de Vigo, et peut-etre une expo au bar du port… c’est l’idée de la nuit. Je n’ai encore rien dit à personne, ni même au gars du bar… Gwendal, t’as la primeur. 😉

  2. SALUT ROZ AVEL , décidement le vendredi 13 c est bien le mauvais jour , si on se met a plusieurs a t envoyer un peu de sous ( par cheque ) ca pourrai vous dépanner ;
    tu as mon adresse mail perso , repond moi si tu veux , j aimerai vous aider sur ce coup la ; a plus …. courage !!!

    • Thierry, c’est vraiment TRES, TRES gentil de ta part. Nous allons mettre les aquarelles du capitaine en vente, faudra qu’il en fasse d’autres, tout ça sera en ligne dans un jour ou deux (déjà une bonne quantité de faites depuis l’arrivée en Galice) alors si parmi tout ça il y en a une qui te plait, envoie-nous un mail.
      En tout cas, c’est vraiment sympa.
      A bientôt
      L’équipage

  3. Sympa Thierry ! Alors moi j’ai besoin d’un spi, d’un génois, d’un mouillage neuf…. lol. Je plaisante… Joli geste.
    @ Florian : Si un jour tu remets une hélice, un mécano m’a dit de bloquer l’arbre pour ne pas fatiguer les palier de l’inverseur. Nous le faisions sur le précédent bateau.
    Maintenant nous avons un inverseur hydraulique donc on ne peut pas bloquer l’arbre et chez nous ça tourne…

  4. Si tu peux voir l’ancre enfoncée dans les rochers
    Et sans dire un mot la retirer du fond,
    Ou perdre l’hélice de ton bateau
    Sans un geste et sans un soupir;

    Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite,
    Et recevoir les deux menteurs d’un même front,
    Si tu peux conserver ton courage et ta tête
    Quand tous les autres les perderont,

    Alors tu seras un homme, Florin!

    PS. Florin, Ai o adresa sa-ti trimit si eu o modesta contributie?

    • Multumesc tare mult, Andrei. Îti povestesc mai multe prin mail, mâine seara când o sa pricep cam cum devine cazul.
      Lundi (demain) on y verra plus clair, sur les prix, les délais, sur plein de choses. On avisera, l’armatrice et le capitaine sont un peu la tête dans le guidon pour l’instant (pour ne pas dire sous l’eau…). Ensuite on s’organisera. Pour l’heure on est de plus en plus calés sur les hélices, les diamètres, les pas, les cavitations, les alésages ISO, SAE ou « Spec » (ce qui a l’air, malheureusement, d’être notre cas).
      Amitiés
      Florin

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